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Le blog de doña Fabiana

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Roma: Sofía, Teresa, Cleo, Adela et autres femmes courage

Publié par Kita Stumpf sur 14 Mars 2019, 09:59am

Catégories : #Les visions de Kita Stumpf

Roma: Sofía, Teresa, Cleo, Adela et autres femmes courage

Alfonso Cuarón aime-t-il Rossellini, Fellini et les terrasses sur les toits de Rome ? Probablement. Roma est réaliste, en noir et blanc. Dans une scène, des êtres jouent aux morts sur une terrasse. Au fil des images s'installe une perspective singulière. Le point de vue tacite est celui d'un petit garçon qui grandit dans Mexico, dans la Colonia Roma, au tout début des années 1970. Si l'esthétique est empruntée à mille films, la lenteur déroute. Le film est une pause, qui marque le changement brutal dans la vie de femmes qui partagent une maison en 1970: une mère de famille, Sofia, la domestique Cleo et la mère de la mère de famille, Teresa. Des enfants choyés, un milieu social aisé, une grosse voiture qui frôle les murs pour entrer dans le garage, le chien Borras qui fait ses besoins intempestivement sous la voûte de l'entrée. Voici le cadre de ce drame lent à propos d'une société qui ne change pas mais se transforme constamment et dont Cuarón a décidé, rétrospectivement, de nous montrer des images qu'il a soigneusement fabriquées. 

S'il fallait citer un autre film pour faire la paire, ce serait La Nana, de Sebastián Silva (Chili, 2009) car ce qui frappe dans Roma, c'est le comportement des hommes et des femmes et la maison comme monde parfaitement réglé, carré comme les carreaux du sol que la domestique nettoie patiemment. Comme dans La Nana, les hommes de Roma sont des enfants couards. Le père de famille Antonio ne rentre pas de son voyage à l'étranger et n'a pas le courage de dire à ses enfants qu'il quitte sa femme; le petit copain de la domestique, Fermín, la plante au cinéma puis la menace lorsqu'elle lui annonce qu'il y a des conséquences à leurs ébats. Les jouets des hommes sont les voitures et les armes. Parfois nus dans le cas de l'amant qui exhibe ses prouesses d'arts martiaux après avoir fait l'amour, ou figurés par petits bout lorsque n'apparaît que la main du père de famille qui conduit patiemment sa voiture pour la rentrer dans un garage étroit, les hommes finissent par fuir toutes leurs responsabilités. Telles des ombres avec la montée du soleil au zénith, ils s'évanouissent et laissent les femmes qui finissent par se relever de cet abandon en pleine lumière. En silence, elles bravent leurs peurs et montrent leur courage.

Comme dans La Nana, les prénoms donnent sens. Cleo (à la gloire du père), Teresa (celle qui récolte) et Sofía (la sagesse) sont d'origine grecque. Fermín et Antonio sont romains, "ferme" et "inestimable". Alors, Adela, la petite fille de Sofía et d'Antoine, c'est sans doute Adela Velarde Pérez, qui donne son nom aux Adelitas, femmes soldats qui accompagnaient les hommes de la Révolution mexicaine.

Quant à Borras, le chien, il faut sans doute y voir un clin d'œil à Guillermo Rivas Rowlatt, "El Borras", héros d'une série télé mexicaine diffusée entre 1969 et 1973. 

Roma, Drame d’Alfonso Cuarón. Avec Marina de Tavira, Daniela Demesa, Marco Graf, Yalitza Aparicio. États-Unis–Mexique, 2018, 135 mn.

Roma: Sofía, Teresa, Cleo, Adela et autres femmes courage

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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